Les comptes courants d’associés : création et responsabilité
Le compte courant d’associé est un mode de financement apparenté au prêt. Il peut être à court ou long terme mais n’octroie pas de pouvoir particulier.
I. La création du compte courant d’associé
A. La forme
En principe, il n’y a pas de formalisme spécifique pour mettre en place un compte courant d’associé. En effet, le simple consentement est suffisant. Toutefois, un écrit est fortement recommandé.
De plus l’écrit est notamment obligatoire en cas de clauses particulières, du taux d’intérêt applicable pour la rémunération ou encore du point de vue de la comptabilité. Faute de quoi, des sanctions seront appliquées.
B. Les contraintes
Il existe des contraintes venant du fait que la convention de compte courant d’associé se heurte au monopole des Etablissements de crédit en matière de fonds reçus du public (article L.312-2 du code monétaire et financier).
L’avance en compte courant d’associé pour les sociétés de personnes, les sociétés civiles, les sociétés en nom collectif ou les sociétés en commandite simple est considérée comme une convention dite « normale » de sorte qu’une procédure d’approbation n’est pas utile. Le champ d’application de la procédure d’approbation est prévu à l’article L. 225-38 du Code de commerce.
Pour autant, il est conseillé, pour la société, d’y consentir du fait de la sécurité qu’elle procure.
Elle est toutefois obligatoire s’agissant des SARL et SAS.
De plus, un régime particulier est prévu pour différents types de sociétés : les sociétés d’exercice libéral (loi du 31.12.1990), les sociétés d’économie mixte locales (article L.1522-5 du code général des collectivités territoriales) et les sociétés à objet immobilier.
II. Les droits et les obligations de l’associé-prêteur
A. Le droit à la rémunération
La rémunération du prêt s’effectue par le versement d’intérêts.
Il y a une forme à respecter puisque le taux doit être prévu et écrit dans la convention.
Ce peut être un taux conventionnel (à taux variable ou fixe) ou un taux effectif global (coût total de la réparation). La fréquence de cette rémunération doit être prévue pas les parties (annuelle, trimestrielle ou mensuelle).
En tout état de cause, si aucun taux n’est prévu dans la convention, il sera appliqué le taux légal après mise en demeure.
B. Le droit au remboursement permanent
-
- Le principe
L’associé – prêteur peut demander le remboursement de son avance en compte courant d’associé à tout moment dans le respect, toutefois, de l’intérêt social.
-
- Les limites
-
-
- Les limites conventionnelles
-
Les parties à la convention peuvent décider d’apporter des limites à ce droit de remboursement permanent. Dans ce cas là, elles devront prévoir ces limitations dans la convention de compte courant d’associé, dans les statuts ou par une décision de l’assemblée des associés prise à l’unanimité.
La renonciation à un droit doit résulter d’une volonté certaine et non équivoque.
À noter : il n’est pas possible de laisser aux organes de direction, le soin de fixer les conditions de remboursement. À défaut, la clause sera réputée non écrite.
-
-
- Les limites légales
-
La loi est intervenue pour prévoir des cas où le remboursement des avances en comptes courants d’associés n’est pas possible.
D’une part, dans les sociétés à risques illimités, dans le cadre de la contribution aux pertes. D’autre part, en cas de procédure collective. Encore faut-il ici distinguer les avances faites avant le jugement d’ouverture et celles faites après.
Dans le premier cas, une avance en compte courant ne peut donner lieu à remboursement si l’associé – prêteur avait connaissance de la situation financière de la société en difficulté.
Dans le second cas, le remboursement pourra être effectué si l’avance avait pour objet de mettre à disposition des fonds pour la société.
C. La responsabilité de l’associé – prêteur
1. La responsabilité civile
Plusieurs situations permettent d’engager la responsabilité civile de l’associé prêteur, notamment : la non remise de fonds promise, le soutien financier abusif ou encore la rupture abusive du crédit.
2. La responsabilité pénale
Il y a deux cas principaux qui entraînent la responsabilité pénale de l’associé – prêteur. Il s’agit, en premier lieu, des abus de biens sociaux pour les sociétés par actions ou SARL qui correspond au fait qu’un dirigeant d’une société a permis des avances en comptes courants d’associés alors que cela n’allait pas dans l’intérêt de celle-ci. En second lieu, il y a les abus de crédit qui correspond au fait qu’un compte courant d’associé est systématiquement en position de débit.
III. Les conventions particulières sur le compte courant d’associé
A. L’aménagement du droit au remboursement
Le droit au remboursement peut être encadré par des clauses telle que la clause de différé de remboursement qui permet de reporter l’échéance (total ou partiel) ou encore la clause de blocage qui permet de déterminer un terme prévu qui peut être soit certain ou incertain (lié à un événement particulier).
B. La constitution d’une garantie par le compte courant
-
- Le nantissement
Il permet à l’associé – prêteur de posséder une partie de la société à hauteur de son avance en compte courant en cas de défaillance de la société (article 2355 et suivants du code civil).
En effet, dans l’hypothèse où la société n’est plus en mesure de rembourser cette avance, l’associé – prêteur disposera, en contrepartie, d’une mainmise sur une partie du capital social de la société.
Par ailleurs, l’associé – prêteur possède un droit de préférence dans la mesure où il pourra se faire payer avant les autres créanciers.
- La délégation imparfaite
Cette forme de délégation permet à un établissement de crédit de ne pas prêter directement à une société. Il va passer par l’intermédiaire d’un associé de celle-ci afin de garantir le crédit octroyé par le biais de son patrimoine. De sorte que la banque va octroyer le prêt à l’associé qui fera une avance en compte courant à la société.
- La cession du compte courant
Ce type de cession peut s’apparenter à une cession de créance.
Quand la cession s’effectue moyennant un prix, celui-ci doit être déterminé ou déterminable et peu importe qu’il soit symbolique.
Cette cession peut être indépendante ou concomitante à une cession de parts sociales. Pour autant, il est préférable de stipuler une indivisibilité des deux cessions.
À noter que les parties peuvent prévoir une clause compromissoire quand la cession intervient dans le cadre de leur activité professionnelle.
IV. La fiscalité du compte courant d’associé
A. Du point de vue de la société
Les rémunérations servies aux associés à raison des sommes qu’ils laissent ou mettent à la disposition de la société, en sus de leur part de capital sont déductibles, en principe, des bénéfices sociaux, quelle que soit la forme de la société.
La déduction est toutefois soumise à plusieurs limitations. Deux d’entre elles, relatives à la libération du capital et au taux d’intérêt pratiqué, ont une portée générale : elles concernent toutes les catégories de sociétés et l’ensemble de leurs associés. Deux autres limitations, destinées à lutter contre les schémas d’endettement artificiel et la sous-capitalisation sont spécifiques aux sociétés soumises à l’IS : elles s’appliquent notamment aux intérêts versés par celles-ci à des entreprises liées, qu’elles soient ou non associées.
Enfin, la société est soumise à une obligation de déclaration (article 242 ter du code général des impôts) afin que la déduction soit possible.
Il n’y a pas de droits d’enregistrement quand il y a un apport en numéraire libéré par compensation.
Ce type d’apport suppose que l’augmentation du capital de la société s’effectue par l’absorption d’une créance. Ainsi, le créancier obtiendra en contrepartie des parts du capital de la société.
B. Du point de vue de l’associé prêteur
Lorsqu’ils sont perçus par une entreprise, les intérêts de comptes courants d’associés sont compris dans les bénéfices professionnels et imposés, en tant que tels, soit à l’impôt sur le revenu, soit à l’impôt sur les sociétés. Cependant, lorsqu’ils sont perçus par une entreprise relevant de l’impôt sur le revenu qui n’a pas opté pour la tolérance prévue à l’article 155, II du CGI, ils suivent le même régime que celui prévu dans le cas où ils sont perçus par des personnes physiques
Lorsqu’ils sont perçus par une personne physique, les intérêts des comptes courants d’associés constituent des revenus de capitaux mobiliers. Pour les intérêts perçus à compter de 2018, sauf option globale pour l’imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu, ils sont soumis en principe au prélèvement forfaitaire unique auquel il convient d’ajouter les prélèvements sociaux. Cependant, en pratique, lors de leur versement, ils font l’objet, sauf exception, du prélèvement forfaitaire non libératoire valant acompte et imputable sur l’impôt sur le revenu à payer l’année suivante et, en cas d’excédent, restituable.
Par ailleurs, à compter du 1er janvier 2018, l’ISF est remplacé par l’IFI, impôt sur la fortune immobilière. Entrent dans le champ de ce nouvel impôt non seulement les biens et droits immobiliers mais également certains titres de sociétés, à hauteur de la fraction représentative de biens immobiliers détenus par la société en cause.
Ce ratio immobilier taxable doit éventuellement être corrigé du fait de l’existence au passif de la société de dettes dont la loi interdit la prise en compte pour la valorisation des titres du redevable (clause anti abus). Dans la mesure où il constitue une dette de la société envers un associé, le compte courant d’associé est par nature susceptible d’entrer dans le champ d’application de la clause anti-abus. Le sort de ce type de dette pose question du fait de l’absence d’affectation des sommes en cause.
En tout état de cause, le recours à un avocat pour la rédaction de votre convention de compte courant ou en cas de contentieux, apparaît indispensable.
N’hésitez pas à nous contacter, nous saurons vous conseiller !